Invitation      Affiche

Sofi Hemon - oeuvre présentée à la Tôlerie de Clermont-Ferrand

     Depuis quatre ans je développe une structure ramifiée sur plusieurs axes et à plusieurs niveaux.  Après la lune et avant le soleil  (l’indéterminé une poétique du geste) relient des œuvres différentes et  connectent des gens différents. Cette structure, sans cesse alimentée et modifiée, est faite de peintures (Etendues : incidences ) , de volumes, de notations, de  photonégatifs et de propositions vidéos.  Elle me permet des associations que je ne cherche pas à prévoir. Je fragmente chacun des axes et le connecte de façon inattendue à un autre branchement de la structure..

      -Après la lune et avant le soleil  (l’indéterminé une poétique du geste)  est une installation  composée de nacelles légères suspendues et reliées entre elles par des câblages. Les matériaux utilisés  sont  choisis en fonction de mes déplacements et relève d’une forme de cueillette. Ils sont liés à un lieu, une rivière, une lumière. La fluidité des matériaux fait surgir des gestes de la mémoire.  Certains gestes du tissage et du nouage sont semblables à des réminiscences. 

Il arrivera que le dispositif soit comme entreposé et ses éléments accumulés. Je me réjouis d’éventuelles superpositions et des interférences qui viendraient troubler la lisibilité des formes.

      Etendues : incidences

Ces peintures ont été  réalisé entre 2001 et 2004 , 9 sont présentées à la Tôlerie
300cm X 200cm

Je module   additionne superpose   des gestes   Les empreintes révèlent des ondes   des méandres   des espacements   Les draps sont devenus des espaces - infini/ grands    Mon regard se dilate   sur une texture saturée - infini/minuscule   Me voilà enfin dépossédée de la forme    «  Si ton regard était plus sensible tu verrais toute  chose se mouvoir »  

 

     Comme transparente la matière 
(Pourquoi ceci plutôt qu’autre chose ?)
Est une proposition vidéo  réalisée à partir de négatifs d’archives personnelles de tables d’atelier. Ces négatifs sont superposés et passent en fondu enchaînés sur des temps très courts.
Ces «  zones » surchargées sont intercalées avec des zones monochromes.

Réalisation : Sofi Hemon
Son : Reste de vague-août 2005 - Ollivier Coupille
Montage : Pierre Hemon
Mars 2006

 

ROBERT DICKSON

Robert Dickson est l'auteur de six recueils de poésie dont humains paysages en temps de paix relative, Prix littéraire du Gouverneur général du Canada, catégorie poésie, en 2002. Libertés provisoires paraît en 2005. Il a établi la traduction française de Frog Moon (Kaki) de la romancière Lola Lemire Tostevin et de Kiss of the Fur Queen (Champion et Ooneemeetoo) de Tomson Highway, grand auteur amérindien du Canada. Ses traductions anglaises de trois pièces du dramaturge Jean Marc Dalpé ont tenu l’affiche à Toronto, Ottawa, Montréal, Vancouver et au Festival Stratford en Ontario. À partir des années 1970, il participe à des films, signe des paroles de chansons, notamment avec le groupe CANO et fait des performances poésie-musique dans le cadre de la Cuisine de la poésie. Il est invité à de nombreux Salons du livre et à des Festivals littéraires au Canada et à l'étranger. Associé aux Éditions Prise de parole depuis plus de trente ans, Dickson a longtemps présidé son Conseil d'administration et est toujours membre de son Comité d'édition littéraire. Dickson est Professeur émérite à l’Université Laurentienne, (Sudbury, Ontario).


Humains paysages en temps de paix relative (maquette et œuvre couverture, avec trois œuvres couleur de Sofi Hémon), Sudbury, les Éditions Prise de parole, 2002.
Libertés provisoires, (œuvre couverture de Sofi Hemon), Sudbury, les Éditions Prise de parole, 2005.

 

Texte de Robert Dickson :

Oser l'osier

Lorsque Sofi Hemon m'invite à collaborer à un projet où cohabiteraient images et texte, elle évoque «un écrit de 50 mots à 50 pages».  De quoi faire rêver, ou alors halluciner, devant les possibilités vastes comme la toundra.  Seule consigne : un texte libre qui ne tenterait en rien d'«expliquer» les images qui l'accompagneraient.  Dans mon esprit je reviens, comme inéluctablement, à cette journée de février 2005 où Sofi et moi, en compagnie de deux êtres chers, sommes allés à la recherche de l'osier.  Je me rends compte que ce moment m'avait profondément marqué.  Me revient en mémoire la rivière de mon enfance, les heures passées à patiner et à jouer au hockey l'hiver, à taquiner la truite mouchetée dès l'ouverture de la saison de la pêche au printemps, voire même à l'occasion quelques jours à l'avance, ainsi qu'à passer de grandes heures à nager et à jouer dans l'eau l'été.  Espèce amphibie.   Si le cœur est un muscle involontaire, la mémoire est un terreau riche, capable d'accueillir et de nourrir ce qui y est planté.  Et qui se transforme en croissant.  Je m'offre aussi quelques lectures sur la vannerie, riches de renseignements et de langage spécialisé, voire de proverbes et de dictons.  Alors, peu à peu, des mots se retrouvent sur le papier, un texte se trame, inspiré par ce qui fut à l'origine une réelle activité physique : l'osier ne se cueille pas comme des violettes, disons.  Mais également une activité psychique et émotive : l'étrangeté et le merveilleux pour moi, Canadien, point étranger aux étendues d'eau douce, de me retrouver dans le lit d'une rivière, à plus forte raison en hiver.

Au fil de l'écriture du texte, je commence à entendre, bien à mon insu, des échos du grand poème «Arbres» du Québécois Paul-Marie Lapointe, avec ses nombreuses  énumérations et allusions aux rythmes changeants.  Et puisqu'il s'agit de donner forme à cette création/recréation, je cherche surtout un rythme qui puisse correspondre un tant soit peu aux mouvements conjugués du courant de la rivière, du va-et-vient de l'osier au vent, de notre joyeux quatuor qui faisait sa récolte hivernale.  Je finis par privilégier un texte où le déroulement des mots n'est pas brisé, visuellement, par des marques de ponctuation (sauf exception).  Tentative de fluidité pour accueillir comme dans un seul courant de mots-mis-en-poésie la mémoire, la matière et la manière des forces, naturelles ou humaines, qui travaillent et qui créent.

Donner un sens autre à l'expérience brute. Transformer, reformer.

Un projet marqué au sceau de ce que j'appellerais une joyeuse exigence.

Robert Dickson
Aix-en-Provence
mars 2006

Invitation        Affiche